La meilleure façon de marcher ?
D’Anna Castagnoli – Illustré par Gaia Stella
Aux éditions Grasset jeunesse
Un vieil homme, un enfant et un âne se dirigent vers la ville de Bonvent. Avant d’arriver, il y a plusieurs étapes et il faut passer par les villes de Languependue, Grande-Grinche, Guerrelasse, Durcoeur et Haute-Flemme. À chaque passage, les trois voyageurs ne cessent d’entendre des critiques sur leur façon de marcher : « Non mais, avez-vous vu cet homme sans cœur qui laisse aller à pied un si petit garçon ? » Et puis aussi : « Quelle misère ! Ce garçon plein de vie qui laisse ce pauvre vieux aller ainsi à pied… C’est tout bonnement scandaleux ! » Et même : « C’est un trop lourd fardeau pour un âne si frêle ! Est-il possible d’être si cruel ? »
Le texte d’Anna Castagnoli est fort drôle et très bien écrit, avec de jolis jeux de mots. C’est une réécriture moderne intéressante d’un conte qui a été plusieurs fois adaptés (Ésope, Jean de la Fontaine…). Cette histoire parle des préjugés, du jugement hâtif d’autrui, des rumeurs qui se propagent mais aussi de tolérance et de libertés. Est-il possible de faire ce que l’on souhaite sans se soucier de l’opinion des autres ?
Les illustrations de Gaia Stella sont pleines de couleurs acidulés et de formes graphiques. On peut s’amuser à regarder tous les petits détails de l’illustration, les habitants des différentes villes, leurs costumes… On craque également pour l’architecture des lieux qui rappellent des villes existantes.
C’est un album coup de cœur pour parler de sujets importants, pour s’ouvrir l’esprit, pour comprendre qu’il peut y avoir des opinions qui divergent mais qu’il n’en existe aucune meilleure qu’une autre, et enfin, pour admettre qu’on ne peut pas plaire à tout le monde ! Tout le monde est différent, l’uniformité n’existe pas, et dans notre monde d’aujourd’hui, il serait temps que tous en prennent conscience. On peut évidemment pencher pour l’une des solutions, trouver sa « meilleure façon de marcher », mais il faudra accepter celle des autres. Un album qui questionne, publié aux éditions Grasset jeunesse, que je recommande avec plaisir dès l’âge de 5 ans.
Le texte d’Anna Castagnoli est fort drôle et très bien écrit, avec de jolis jeux de mots.
Anna Castagnoli a eu la gentillesse de laisser une jolie anecdote sur mon compte Instagram que j’ai plaisir à vous partager ici :
« Cette histoire a été racontée depuis la nuit des temps, la première version écrite connue vient d’Esopo. Mon père me la racontait quand j’étais enfant, dans une version très courte, presque proverbiale. Elle me fascinait parce que je ne trouvais jamais la solution. La petite et modeste touche personnelle que j’ai ajoutée, outre l’invention des villes à traverser et à atteindre, est celle de ne pas mettre une finale moralisante. La dernière question adressée au lecteur, et reprise dans le titre, amène l’enfant à réfléchir. Il n’existe pas de solution simple et facile (nous devons faire ce que nous voulons sans écouter les autres / nous devons nous adapter aux traditions locales / nous ne devons pas, etc.). Le problème de vivre ensemble étant tous différents n’est pas là. J’espère que le lecteur en arrivera à la conclusion que la seule chose que ces personnages n’ont pas essayée, c’est de se parler. »
Le lien pour suivre le travail de l’illustratrice : Gaia Stella
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